Ce que vous ne lirez pas dans le prochain numéro de Canal !

Le maire et sa majorité demandent à Darmanin (Ministre de l’Intérieur) le classement des Quatre Chemins en « Quartier de Reconquête Républicaine ». Cette décision n’est pas la bonne pour combattre la criminalité et va renforcer les tensions dans le quartier.

Que s’est-il passé au dernier Conseil Municipal?

Jeudi 20 octobre avait lieu une séance de Conseil Municipal de Pantin. Vers 23h, après 4h de discussions, un sujet non inscrit à l’ordre du jour a été débattu. Sur proposition du groupe « Les Républicains », M. Le Maire a mis au vote un vœu demandant à Darmanin de classer les Quatre Chemins en « Quartier de Reconquête Républicaine ».

Ce sujet sérieux a été débattu sans possibilité pour les élus d’opposition de préparer leur intervention : les règles de base du débat démocratique n’ont pas été respectées.

Tous les élus présents (PS, EELV, LR et PCF) ont voté pour. Seul « Nous Sommes Pantin » a voté contre. On vous explique pourquoi.

Qu’est-ce que le dispositif « Quartier de Reconquête Républicaine » ?

Ce dispositif, créé en 2018, existe dans 54 quartiers en France. Il a pour objectif de faire intervenir des policiers de la « Brigade Territoriale de Contact » (BTC). Aux Quatre-Chemins, ce dispositif existe déjà côté Aubervilliers. La BTC est composée de policiers jeunes, peu formés et ne venant pas de région parisienne. Ils ont pour mission principale de cibler le trafic de drogue et le commerce de contrebande.

Pourquoi ce vote est un danger pour les habitants?

Cette brigade est connue pour ses méthodes violentes et le non-respect des règles de droit. Ses interventions ont une conséquence majeure : elles renforcent la tension dans l’espace public.

En novembre 2020, ce sont, en effet, trois policiers de la BTC qui avaient tabassé pendant 20 minutes Michel Zecler dans le 17ème arrondissement de Paris. Des images de l’agression, filmées à l’insu des policiers et diffusées par le site Loopsider, avaient mis la lumière sur les méthodes violentes de cette brigade.

A Pantin, 8 policiers de la BTC ont été mis en garde à vue en février 2021 et poursuivis pour « violences volontaires » par personne dépositaire de l’autorité publique, « faux en écriture publique », « arrestation arbitraire » et « détention de stupéfiants ». Certains d’entre eux ont été sanctionnés et ont été mutés loin de Pantin. Les victimes de ces agissements sont des jeunes noirs et arabes habitant les quartiers Ilot 27, Quatre Chemins et Courtillières.

Contrairement à ce qui est dit par la Préfecture et par le Maire de Pantin, la BTC n’est pas une « police de proximité » comme celle qui existait il y a 20 ans : elle ne fait pas de missions de prévention et a très peu de contacts avec les habitants.

Depuis près de 20 ans, des brigades sont créées spécialement pour les quartiers populaires (BAC, BST, BTC).. Le bilan est clairement négatif : la délinquance ne baisse pas et seules les « petites mains » du trafic sont ciblées. Surtout, les tensions entre policiers et habitants se multiplient à cause des violences verbales et physiques que les habitants subissent.

Aux Quatre-Chemins, le quartier est classé « Zone de sécurité prioritaire » depuis 2013 : est-ce que la situation du quartier s’est améliorée pour autant ?

Pourquoi ce vœu va dans le sens de l’extrême droite ?

Ce dispositif s’inscrit dans une vison autoritaire et raciste de l’action de l’État dans les quartiers populaires.

Arrêtons nous sur l’intitulé de ce dispositif. Le terme de « Reconquête » est accaparé par Zemmour qui en a fait le nom de son parti politique. Ce terme, qui fait référence au moment historique où les Arabes furent chassés d’Espagne (la « Reconquista »), a bien du mal à s’accorder avec l’objectif « Républicain ».

Les habitants de ces quartiers ne seraient pas de vrais républicains ?

Les valeurs républicaines auraient quitté les quartiers populaires?

Non ! c’est plutôt l’État qui a quitté ses quartiers en fermant des écoles, des hôpitaux, des maternités, des bureaux de poste… Actuellement, Macron et son gouvernement détruisent encore des services publics : hôpitaux avec moins de soignants, écoles avec des enseignants pas formés, bus et métros bondés faute de personnel.

Nous ne sommes pas « anti police ».

M. le maire a raison quand il dit que le quartier exprime un besoin de police et de services publics.

Mais les trafics qui ont lieu aux Quatre Chemins ne seront pas combattus efficacement avec l’intervention de la BTC.

Pour démanteler les trafics, M. le maire devrait plutôt demander d’autres types de moyens : par exemple davantage d’officiers de police judiciaire dédiés à l’enquête. Il en manque cruellement en Seine-Saint-Denis. Seule la police judiciaire peut mettre à mal les réseaux de marchands de sommeil et ceux des trafics en tout genre, en identifiant les donneurs d’ordre et démantelant leurs vitrines de blanchiment, ces fausses boutiques que tout le monde connait dans le quartier et qui appauvrissent son offre commerciale. Actuellement, Darmanin fait une réforme de la police judiciaire pour réduire les moyens dédiés à l’investigation et donc aux enquêtes.

En clair, ce que Darmanin veut :

  • moins de policiers qui enquêtent,
  • moins de moyens pour la prévention
  • plus de police qui tabasse !

Le maire et sa majorité ont donc choisi la plus mauvaise des façons de répondre à la demande de sécurité des habitants des Quatre Chemins : qu’ils commettent des délits ou non, ce sont nos enfants qui vont morfler et subir la violence de la BTC !

La municipalité devrait agir davantage dans des missions de prévention et proposer des espaces d’émancipation pour les jeunesses du quartier. Elle pourrait :

– consolider les liens entre services municipaux et les éducateurs de rue.
– programmer plus d’évènements sportifs et culturels dans le quartier, notamment en soirée et les week-end. L’ancien collège regroupe des activités artistiques mais n’est pas ouvert aux habitants. La salle Jacques Brel est peu utilisée par les habitants, tout comme les Sheds situés dans le quartier Diderot.
– rénover et animer les équipements locaux vétustes (gymnase, City-stade) et trop petits pour répondre aux besoins du quartier (centre social).

Atelier NSP « Installer la sérénité dans nos rues » du 12/03/2020

Atelier 1 : Quel urbanisme pour Pantin pour des déplacements pacifiés ? 

Constats :
–      La route en Y en face de la mairie est très dangereuse. Une enfant s’est faite faucher par une voiture dans cette zone. Pas de ralentisseur, feux insuffisants : aucun système de régulation passive de la circulation. Tout est pensé pour les voitures.
–      La construction d’une nouvelle école à Diderot génère des difficultés de circulation et la présence de gros camions : dangereux pour les piétons et les enfants
–      A l’école Langevin, trop de circulation devant l’école.
–      Le collège Joliot-Curie est au bord de l’avenue Jean Lolive.
–      Les passages piétons ne sont pas assez nombreux, il faut parfois marcher longtemps pour en trouver un.
–      Les aménagements pour que les voitures ne se garent pas sur les trottoirs peuvent être inefficaces et même dangereux pour les vélos. Exemple rue Etienne Marcel : un petit « muret » sépare la route voiture de la piste cyclable : difficile de conduire à vélo dans cet espace restreint, d’autant plus que dans le couloir vélo s’entassent les déchets, les crottes de chien, de chevaux et l’eau quand il pleut ! Et les voitures se garent quand même dans la rue dans les quelques endroits où il n’y a pas de murets et le cycliste doit jongler avec tout ça. 

Quel urbanisme pour Pantin pour des déplacements sereins ?
–      Entendre les usagers
–      Tout remettre à plat :
o  Quels usages de la voiture (livraisons, voitures qui traversent Pantin s’en s’y arrêter, pantinois qui se déplacent en voiture) ?
o  Quels usages du vélo, des piétons, des transports en commun, des autres modes de transport (trottinette etc.) ?
–      Faire une cartographie des flux :
o  Identifier les zones dangereuseso  Identifier les aménagements inutiles voire dangereux, posés initialement pour tempérer les automobilistes mais qui se révèlent au final dangereux pour les piétons et les vélos-      Mettre en cohérence les aménagements dans les quartiers pour que chacun.e (enfant, handicapé, personne âgée, cycliste, piéton etc.) puisse se déplacer sereinement. Un exemple de propositions possibles : création de zones piétonnières temporaires aux abords des écoles aux moments des entrées et sorties.
–      Être vigilant à ce que les solutions qui seront proposées pour désengorger la ville ne déplacent pas le problème en périphérie ou dans d’autres villes. 

Quel usage des PV pour les voitures ? 
–      Se mettre d’accord sur ce qui est inacceptable 
–      Prendre en considération les besoins des personnes dans l’environnement qui leur est donné 

Combats à mener vis-à-vis de l’extérieur :
–      S’affirmer en portant nos constats et nos propositions au niveau du département, de la région etc.
–      Ne pas laisser Paris transformer Pantin, en tant que première couronne de Paris, en dépotoir (crématorium, projet de Paris sans voiture)

Atelier 2 : Vivre sereinement dans son quartier Sérénité, sécurité, insécurité, violence : de quoi parle-t-on ?  

– Le terme de « sécurité » est très utilisé, voire instrumentalisé, par la droite et l’extrême-droite 
– Il n’est pas évident de déconstruire les discours habituels et les préjugés sur cette notion, d’où aussi peut-être le choix de parler de « sérénité » pour cette soirée
– Peut-être une forme de consensus des participants sur un point : l’insécurité, c’est la crainte d’une violence qu’on subit, qu’on est susceptible de subir, notamment de façon inattendue et arbitraire, mais aussi parfois de façon permanente, par exemple quand les équipements sont inadaptés 
– Il ne faut pas nier la violence, mais il faut savoir considérer les diverses formes de violence. Il y a une violence directement liée à des formes de délinquances, parfois même économique / organisée (deal, vendeurs à la sauvette ou pickpockets du métro des quatre-chemins). Mais il y a aussi une violence institutionnelle, exercée sur certaines catégories de la population par ceux-là mêmes qui devraient assister / unifier / protéger. 
– Pour les femmes, il y a aussi la préoccupation d’une forte présence masculine (voire d’une absence des femmes) dans les espaces publics de certains quartiers (Quatre-Chemins), notamment le soir. Ça ne suscite pas forcément de crainte prononcée mais une impression d’étrangeté. Ce point n’a pas vraiment pu être creusé dans le temps imparti. Plus généralement il y a un problème de partage, ou de co-utilisation de l’espace public : un autre exemple en est la violence subie par les aînés assis sur des pierres autour desquelles tournent les mobylettes de jeunes. Comment répondre à la problématique de chacun, trouver un espace pour chacun ? 

Quelques formes de la violence institutionnelle à Pantin :
– Il y a une violence économique,  notamment du fait de la relégation économique de certains quartiers, des discriminations, etc. L’absence d’emploi accroît la violence dans un quartier. Quand les gens ont une possibilité de s’en sortir, même précaire (Uber), la violence décroît. Très peu de choses en dehors de la sphère économique privée pour aider au maintien d’une vie décente dans ces quartiers, qui sont en quelque sorte victimes des abus du capitalisme.
– Il y a une violence sociale qui passe par la stigmatisation de certains publics, notamment des jeunes. Certains jeunes sont enfermés dans leurs immeubles, n’ont pas d’occasion de sortir et de sociabiliser car les équipements dédiés sont insuffisants (maisons de quartier) ou disparus (MJC). A d’autres on impose – plutôt qu’on ne propose ou co-construit – des projets qui ne les concernent pas et qui accroissent le sentiment de rejet. Pour les adultes, cette violence passe aussi par l’accès très difficile aux services publics, notamment sociaux : certains quartiers sont sous-équipés et l’inscription à la CAF, à Pôle Emploi, etc. est très difficile.  
– Il y a des formes de violence urbanistique (?). L’organisation de la ville fait que certains quartiers sont écartés (Quatre-Chemins), voire carrément enclavés (Courtillières). Le fait de se rendre en centre-ville ou à Paris est (volontairement rendu ?) difficile, on entretient la séparation des populations, une forme de ghettoïsation. De plus les immeubles de l’OPH sont parfois délabrés, avec des ascenseurs en panne, etc. 
– Il y a enfin une violence directement institutionnelle, policière qui s’exerce souvent de manière arbitraire contre certaines catégories de population, notamment les plus jeunes (ils voient arriver la police et ils ont peur des violences) et cette violence est de plus en plus… violente (question des armes confiées à la police nationale (LBD, etc.) et municipale) et technique (vidéosurveillance, etc.)

Elargir le débat sur la sécurité :
– La plupart des politiques évoquent fréquemment la question de l’insécurité, qui prend beaucoup d’importance dans le débat public, mais qui se résume trop souvent / toujours à la question de la diminution de la délinquance.
– Cette question de la diminution de la délinquance est considérée comme une question presque technique. On donne plus de moyens (techniques sinon humains) à la police, c’est à dire qu’on donne à la police nationale un armement de plus en plus massif, qu’on réfléchit à armer la police municipale, qu’on place partout des caméras de vidéosurveillance, etc. Cet accroissement des moyens de la répression policière mène à une escalade de la violence, qui n’est pas sans conséquences y compris économiques et sociales (claustration des habitants, disparition des commerces, etc.)
– Pour sortir de cette spirale infernale, il faut traiter de front les différentes formes de violence évoquées au paragraphe précédent

Ce que nous pourrions proposer :
Vivre sans police ? Ou avec une police différente. 
– Sur la question de la répression policière : il faut sortir de ce débat « pour ou contre l’armement de la police municipale » qui n’est jamais qu’une marche un peu ralentie vers son futur armement. Chez NSP, nous ne souhaitons pas a priori que la police municipale soit armée, mais il faut aboutir à une proposition alternative par un débat avec les habitants.  
– Il pourrait y avoir différentes alternatives : plus de policiers municipaux, mais aussi et surtout une redéfinition de leur rôle auprès des habitants et surtout des plus jeunes, et surtout une coordination avec d’autres professionnels (éducateurs, travailleurs sociaux, animateurs et médiateurs culturels, etc…) 
– La police municipale pourrait être comptable de ses actions également devant une commission citoyenne. En particulier, les comportements racistes de la police doivent pouvoir être dénoncés immédiatement.  La sécurité passe par la réduction de la violence économique et sociale – les habitants doivent participer à dégager le chemin de crêtes 
– La violence est à des niveaux différenciés sur le territoire communal parce que les différents quartiers sont très isolés les uns des autres. Il faut diminuer les inégalités spatiales pour réduire la violence. 
– Le rôle de comités locaux (de quartiers, de voisinage) doit être remis au goût du jour, élargi, pour que les habitants priorisent les besoins de leur quartier (parmi lesquels, étroitement intriquée aux autres, lé réduction de la violence) 
– L’éducation populaire peut jouer un rôle aussi dans la sérénité des quartiers, ainsi que la création d’espaces réellement inclusifs et accueillants offrant des possibilités aux habitants, notamment les plus jeunes.