Vendredi dernier, un crime terroriste d’une violence extrême a été perpétré à l’encontre d’un professeur d’histoire-géographie, M. Samuel Paty. Cet acte terrifiant, commis par une personne si jeune, nous a profondément choqué.e.s et attristé.e.s, et nous nous associons aux nombreux hommages rendus à Samuel Paty.
Suite à cet événement, il a été annoncé lundi que le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait ordonné la fermeture de la Mosquée de Pantin, dès mercredi 21 octobre au soir, pour une durée de 6 mois, au motif qu’une vidéo dénonçant un cours fait par M.Samuel Paty avait été relayée par le responsable de la mosquée sur les réseaux sociaux. Une telle mesure est rendue possible par la loi SILT du 30 octobre 2017, issue de l’état d’urgence, permettant au préfet de procéder à la fermeture administrative, pour une durée ne pouvant excéder six mois, des lieux de culte, pour apologie ou provocation au terrorisme. Cette loi avait été dénoncée à l’époque comme liberticide par des médias comme le New York Times, plusieurs organisations, dont Amnesty International France, la Ligue des droits de l’Homme ou le syndicat de la magistrature, mais aussi des personnalités comme le défenseur des droits Jacques Toubon, la juriste Mireille Delmas-Marty, le constitutionnaliste Dominique Rousseau et le commissaire européen aux droits de l’Homme Nils Muiznieks.
L’arrêté mentionne aussi que la mosquée serait fréquentée par quelques personnes ayant des « liens avec le salafisme« , qu’un imam serait « impliqué dans la mouvance islamiste radicale d’île-de-France« , et aurait été formé pendant deux ans dans un « institut fondamentaliste » au Yémen. Il aurait également scolarisé trois de ses enfants dans une école clandestine, à Bobigny.
Un arsenal juridique conséquent permet déjà de s’attaquer à des personnes, imams ou non, soupçonnées d’enfreindre la loi. C’est à la justice de les poursuivre, eux, ou de diligenter une enquête. Si on brime la liberté de culte de toute une communauté sous prétexte qu’un imam a une idéologie douteuse, il n’y a plus de limites à l’intrusion de l’Etat dans les activités des citoyens.
En tant que citoyen.ne.s pantinois.es, nous sommes alarmé.e.s par cette décision, qui prévoit d’emblée la fermeture d’un lieu de culte utilisé par de nombreux citoyens musulmans, pour la durée maximale prévue de 6 mois possible selon cette loi du 30 octobre 2017. Cette mesure punitive et intimidante ne nous paraît en rien nécessaire à un travail judiciaire et d’enquête sur les individus concernés par la publication de cette vidéo ou d’autres infractions. Par contre, elle contribue à limiter les libertés individuelles des usagers de cette mosquée, et à propager une haine des musulman.e.s en croissance exponentielle, qui n’a de cesse de relayer un amalgame honteux entre islam et terrorisme. Une fois de plus, c’est le quartier exilé des Courtillières qui subit une stigmatisation arbitraire.
Nous, citoyen.ne.s pantinois.es, souhaitons exprimer notre solidarité envers les Pantinois.es musulman.e.s visé.e.s par cette mesure, et demandons à la Municipalité de prendre position sur le sujet.
